La crise sanitaire du Covid-19 met à l’épreuve le modèle actuel de l’enseignement supérieur partout dans le monde. Le Maroc ne fait pas l’exception. Le débat surgit sur la qualité de l’enseignement supérieur et ses limites. Quel bilan est donc accompli par le secteur au cours des dernières années, et quels défis peuvent être relevés dans les épisodes qui viennent ?
Enseignement supérieur au Maroc : le bilan est sombre
La majorité des rapports établis à propos de l’enseignement supérieur au Maroc tirent la sonnette d’alarme : surcharge des établissements, inégalités, décrochage universitaire, etc. Dans quelques années, le Maroc comptera plus d’un million d’étudiants dans ses établissements d’enseignement supérieur, pourtant, peu de plans tangibles prévoient l’insertion professionnelle de ces futurs diplômés, concluent ces bilans.
Des réformes seront mises en œuvre à partir de la rentrée prochaine dans l’espérance d’alléger la situation ; sur le plan pédagogique : les établissements préparent l’instauration du système du Bachelor ; financièrement : une commission interministérielle dresse un nouveau mode de financement du secteur éducatif ; et le ministère en charge est en train de restructurer la gouvernance du secteur.
Il importe aussi de souligner l’activation déjà opérationnelle des partenariats public-privé (PPP), en particulier pour appuyer la surcharge dans les villes, et investir dans le milieu rural et périurbain.
Cette année, le ministère a annoncé que les 200 établissements d’enseignement supérieur privé au Maroc ont franchi la barre des 50 000 étudiants. Des appels ont été aussi lancés pour le renforcement des politiques des bourses de mérite et à base des critères sociaux.
L’Université marocaine face aux défis du marché de travail
Les statistiques du Haut-commissariat au Plan (HCP) mettent l’accent sur ce que les médias ont relayé en tant qu’une « bombe à retardement » : le chômage est de plus en plus important auprès des diplômés, et son taux a atteint 16,7% en 2019.
Entre les murs des établissements, les résultats académiques ne sont pas moins inquiétants ; en cinq ans, le taux de réussite des étudiants en enseignement supérieur à accès ouvert a chuté de 27,6 %.
« Il n’y a pas adéquation entre les secteurs concernés par les départs (activités traditionnelles) et ceux concernés par les entrées (activités émergentes)”, alerte le HCP. De graves difficultés d’insertion professionnelle liées à la dévalorisation du diplôme universitaire.
Chantiers et pistes de réforme de l’enseignement supérieur au Maroc
Cependant, les changements technologiques actuels et futurs ainsi que les politiques de développement lancées au Maroc pour les accompagner, ont fait émerger de nouveaux marchés d’emploi.
L’industrie présente l’exemple phare, en particulier l’automobile, l’aéronautique et les énergies renouvelables. Le digital tend aussi à créer de nouvelles pistes, et des établissements ont déjà commencé à prévoir le shift : HEM, notamment connue Business School, qui a lancé HEM Engineering School, son école d’ingénierie informatique, et qui vise la formation d’étudiants ingénieurs à l’avant-garde techniquement, bons communicants et avec l’esprit d’entreprendre.
Face à tous ces défis, des établissements de l’enseignement supérieur, entre publics et privés, ont rapidement commencer à diversifier leur offre de formation. Cette offre est aujourd’hui confirmée et consolidée par une ouverture sur l‘international : dans le secteur privé, mais aussi dans certaines écoles et facultés publiques, des programmes d’échange académique, des partenariats internationaux, et un bon nombre de doubles diplomations avec des établissements étrangers ont été établis.
Un autre débat dure depuis des années autour du choix de la langue d’enseignement. Pourtant, en tout pragmatisme, de nombreux établissements d’enseignement supérieur au Maroc semblent avoir tranché : des cursus trilingues ont été développés, en toute adéquation et adaptabilité avec les marchés dans lesquels leurs lauréats vont opérer, aussi bien en public qu’en privé.
In fine
L’enseignement supérieur au Maroc semble traverser une phase cruciale, sur la base d’un bilan sombre et un nombre d’étudiants de plus en plus croissant. D’autant plus, l’inadéquation entre les formations et les besoins du marché du travail persiste encore. Ces tendances peuvent mener à une surcharge des établissements, une dégradation des résultats académiques et des taux élevés du chômage des diplômés dans les quelques années à venir.
C’est dans ce contexte que des tentatives de réformes ont émergé, dans l’espérance de diversifier l’offre éducative au Maroc, d’assurer une ouverture sur l’international, et de s’adapter aux développements du marché du travail et de ses opportunités, particulièrement dans le secteur industriel et tout ce qui est en relation avec la transformation digitale.